Culture

Les Prairies de Saint-François

Les Prairies: Un lieudit convoité

Le peuplement des Prairies a longtemps été affecté par l’imprécision de la limite sud de la seigneurie Bellechasse-Berthier. Finalement, elle a été établie successivement par les arpenteurs McCarthy et Louis Legendre en 1799, lors de la création du township d’Armagh.

un texte de Jacques Boulet
Société de conservation du patrimoine de Saint-François

Mais bien avant cette date, les censitaires de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, par l’entremise du curé Pierre-Laurent Bédard, se plaignaient que les terres de la Couronne au sud de la seigneurie Bellechasse-Berthier étaient pillées par les propriétaires des seigneuries voisines, dont Michel Blais, qui possédait déjà toutes les terres au sud de la seigneurie de la rivière du Sud. Ayant constaté par les réponses à ses interventions répétées que les autorités en place n’étaient pas favorables à l’agrandissement de la seigneurie au profit des religieuses de l’Hôpital général, le curé Pierre-Laurent Bédard, en 1789, à la demande de ses paroissiens, suggère au Comité des terres d’accorder des portions de ces terres directement aux censitaires de la seigneurie Bellechasse-Berthier qui le désirent. Ses arguments semblent avoir été moins convaincants que ceux de Michel Blais et de James Thompson qui, dès 1773, avaient manifesté le désir d’acquérir ce territoire ainsi que les propriétaires de la seigneurie de Saint-Vallier l’avaient manifesté en 17841.

1re étape : La création du township d’Armagh en 1799 au profit de Michel Blais et de James Thompson

Le dilemme est tranché le 13 juillet 1799 par lettres patentes alors que le Conseil exécutif de la province du Bas-Canada détermine les dimensions du township d’Armagh et accorde à James Thompson, surintendant des travaux publics à la garnison de Québec, et à Michel Blais, écuyer et capitaine de milice pour la paroisse de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, la superficie de 2400 acres de terre, à savoir 1200 acres à chacun d’eux, approximativement un carré de dix milles de côté.

2e étape : L’acquisition du canton d’Armagh par Joseph Fraser en 1826

Quelque trente ans plus tard, dans un contrat du 1er mai 1826 rédigé par Augustin-Noël Blais, notaire à Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, Louis Blais, un parent de Michel et Louis, fils de Louis Blais, vendent à Joseph Fraser, marchand, écuyer et capitaine de milice pour la paroisse de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, tous les droits et prétentions qu’ils peuvent avoir dans le township d’Armagh. Cette partie du township d’Armagh achetée par Joseph Fraser comprend les terres situées au sud du chemin des prairies sur toute la largeur de la paroisse de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud.

Par cette prise de possession du canton d’Armagh Joseph Fraser ajoute un immense domaine à ses nombreuses propriétés acquises antérieurement. Le 18 février 1805 dans un contrat rédigé par le notaire Félix Têtu de Québec Joseph Fraser s’était fait concéder par Louis Dunière toutes les terres non encore concédées du 3e rang au sud de la rivière du Sud (les terres au nord du chemin des Prairies). Dans une transaction plus tardive Joseph Fraser avait également acquis de Claude Denechaud, nouveau régisseur de la seigneurie pour le compte des religieuses de l’Hôpital-général, tout le terrain avoisinant l’ancien moulin banal (moulin en ruine) dans les Grandes Côtes selon le contrat du 23 février 1820 rédigé par le notaire Jean-Charles Létourneau de Montmagny. À sa mort en 1843 Joseph Fraser est encore propriétaire de quelques-unes de ces terres situées au nord du chemin des Prairies qui seront rapidement vendues par son épouse Catherine Talbot.

3e étape : Le début du peuplement du canton d’Armagh : L’œuvre des frères Louis et Romain Martineau

Le 29 août 1836, dans le contrat numéro 1779, du répertoire de François-Marcel Kirouac, notaire à Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, ce même Joseph Fraser cède à Louis Martineau, cultivateur à Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, tous les droits et prétentions qu’il peut avoir dans le canton d’Armagh. Ce dernier se porte acquéreur de cet immense domaine, semble-t-il, dans le but de le convertir en territoire agricole, probablement en raison du fait que la section la plus à l’est est déjà une grande prairie. À la suite de cet achat, dès le 21 novembre 18362, Louis Martineau confie à Joseph Destroismaisons, dit Picard la construction d’un moulin à scie sur la décharge des Prairies. Le même jour, il vend à son frère Romain Martineau une terre de 3 par 28 arpents située dans le 1er rang du canton d’Armagh à la limite de la ligne seigneuriale de la paroisse de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud. Dans ce contrat Louis Martineau mentionne qu’il a l’intention de faire construire sans tarder un moulin à moudre les grains quelque part dans ce domaine qu’il vient d’acquérir.

À peine trois ans plus tard, dans un étonnant contrat d’échange de terres daté du 7 janvier 1839, rédigé par le notaire Vildebon Larue de Saint-Pierre-de-la-Rivière-du-Sud, Louis Martineau cède à son frère Romain Martineau tout ce qui lui appartient encore du canton d’Armagh et reçoit en retour les terres que ce dernier possède dans le premier rang au nord de la rivière du Sud. Cette terre acquise par Louis Martineau est située à l’est de la montée Saint-François et sera désignée par le numéro 18 lors de l’établissement du nouveau cadastre de la paroisse en 1875.

Dans le prochain article, Romain Martineau partage avec un grand nombre de ses compatriotes le 1er rang du canton d’Armagh

Notes de bas de page

1 Louis-Philippe Bonneau, Histoire de la seigneurie Bellechasse-Berthier, p. 311
2 Jean-Baptiste Morin, no : 1650, 21 novembre 1836

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